Justice commerciale

Justice commerciale

Dans le secteur agricole.

Swiss Fair Trade, l’association faîtière qui réunit en Suisse les acteurs du commerce équitable, exige que la politique commerciale agricole suisse soit repensée et adaptée dans le sens d’un développement global et durable visant la réduction de la pauvreté.

Pourquoi est-ce important ?

Le commerce agricole est indispensable pour garantir les conditions de vie dignes des paysannes et des paysans des pays du Sud. Ces échanges ne peuvent cependant avoir des effets positifs que s’ils passent par des partenariats commerciaux durables et transparents, qui se distinguent par des prix équitables, une traçabilité et un partage juste des profits tout au long de la chaîne commerciale. Afin que les conditions de production et de vie soient durables, la protection de l’environnement et de la santé des populations rurales jouent un rôle essentiel.

Qu’en est-il de la situation en Suisse ?

L’Organisation mondiale du commerce (OMC) définit des conditions minimales pour le commerce transfrontalier. Par le biais d’accords de libre-échange avec différents groupes de pays (notamment l’U.E., l’A.E.L.E. et l’Union douanière d’Afrique australe (SACU)), ainsi qu’avec des pays comme la Colombie, le Mexique et le Pérou, la Suisse a mis en place une large ouverture de marché mutuelle. Si ces accords internationaux limitent considérablement les possibilités d’action de la Suisse, une certaine marge de manœuvre politique existe cependant.

La sécurité économique et sociale des paysannes et des paysans du Nord n’est pas comparable avec celle des productrices et des producteurs du Sud. Au Nord – en Suisse en particulier – les subventions directes représentent une part très importante des revenus issus de l’agriculture. Swiss Fair Trade estime par conséquent que la protection de la souveraineté alimentaire dans les pays du Sud, à l’aide d’entraves tarifaires et non tarifaires, est légitime, et se mobilise afin que les exigences de souveraineté alimentaire dans le Nord ne se fassent pas au détriment des familles des agriculteurs du Sud.

Que peut faire la Suisse ?

Les conventions internationales qui existent entre les pays du Nord, dominants et orientés vers les services, et les pays du Sud, essentiellement agraires, cimentent la répartition du travail globale (matières premières versus produits industriels et services) et minent ainsi le droit au développement du Sud. En ce qui concerne la situation en Suisse, nous identifions essentiellement trois champs d’action :

Aujourd’hui déjà, le système de préférences généralisées (SPG) permet aux pays les moins avancés (PMA) d’exporter leurs produits vers la Suisse sans frais de douane ni limitations par des quotas. L’accès au marché suisse est ainsi facilité pour les produits issus des pays en développement les plus pauvres. Le potentiel du SPG n’a cependant même pas été exploité de moitié. Des règles complexes portant sur la vérification de la provenance des produits représentent l’obstacle le plus important. De fait, il est souvent difficile pour les petits producteurs d’obtenir le certificat de provenance nécessaire à une importation exempte de frais de douane.

La Suisse contribue en outre au fait que les produits agricoles subventionnés accèdent aux marchés des pays en développement à des prix trop bas, causant ainsi du tort aux structures de production locales. Les importations bon marché représentent une des raisons principales pour lesquelles les pays africains en particulier sont devenus fortement dépendants des denrées alimentaires importées depuis l’étranger et donc à la merci de la volatilité des prix sur le marché mondial. Les importations bon marché conduisent également à une sortie inutile de devises, puisque la demande pourrait être couverte par une production agricole sur place à des prix permettant de couvrir les coûts de production.

La Suisse soutient son industrie manufacturière en recourant à des surtaxes douanières qui provoquent l’escalade du prix des produits transformés importés. Le développement des secteurs en aval dans les pays en développement est ainsi entravé, empêchant la création d’emplois et de revenus pour une plus grande partie de la population.

Les exigences de Swiss Fair Trade.

Swiss Fair Trade considère que la Suisse peut, avec les points suivants, mettre en place des conditions plus avantageuses pour les pays en développement:

1. Ajuster le système de progressivité des droits, afin que la création de valeur ajoutée et la transformation des matières premières directement dans les pays du Sud ne soient pas entravées.

2. Lors de la conclusion d’accords commerciaux bilatéraux avec les pays en développement conformément à la Liste du Comité d’aide au développement de l’OCDE, garantir que les produits agricoles suisses ne puissent pas être vendus sur les marchés partenaires à des prix de dumping.

3. En tant que pays acheteur de produits importés, la Suisse doit s’assurer du respect des droits humains et du travail. Le Conseil fédéral et le Parlement doivent créer les bases légales pour que les entreprises ayant leur siège en Suisse doivent respecter les droits humains et l’environnement partout dans le monde. Les victimes de violations des droits humains et des normes environnementales par ces firmes, leurs filiales et fournisseurs, doivent avoir la possibilité de porter plainte en Suisse pour obtenir réparation.

4. Instaurer un système préférentiel pour les produits durables sur le plan social et écologique.

5. Rendre l’instrument de la garantie contre les risques à l’exportation utile pour le commerce équitable. De fait, les acteurs du commerce équitable ont souvent des difficultés à faire des investissements préalables. Malgré une demande réelle et concrète du marché, la difficulté d’accès à ces fonds et leur sécurité représente souvent un obstacle pour les investisseurs en ce qui concerne la création d’organisations de producteurs et de chaînes de commercialisation. La protection et la garantie contre les risques en tant que mesure de facilitation des échanges permettraient d’alléger le financement et d’aider aux investissements.

6. Supprimer toute forme de subventions liées à l’exportation et à la production. De fait, les subventions à l’agriculture doivent être intégralement organisées dans le cadre de la « green box ». Cela signifie qu’elles ne doivent pas être liées à la production ou créer des distorsions commerciales, mais doivent au contraire assurer des prestations de qualité en ce qui concerne l’utilisation des ressources naturelles et la diversité des paysages.

7. Des mesures techniques, telles que les formalités douanières, les normes industrielles, sanitaires, sécuritaires et autres normes relatives aux informations, à l’emballage, à l’étiquetage et aux données sur la provenance ne doivent pas compliquer inutilement l’accès au marché des produits du Sud.

Cette prise de position a été adoptée par les organisations membres de Swiss Fair Trade lors de l’Assemblée générale 2013.

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